La jurisprudence en matière de financement des mesures Ségur se précise… et elle n’est pas favorable aux associations. En effet, dans une décision de la CNTSS n°A23.023 du 17 juin 2024, les juges se prononcent sur la question du financement du Ségur, et plus précisément sur l’existence d’un droit au financement du coût réel des mesures.
Autrement dit, peut-on considérer que les mesures Ségur constituent des dépenses nouvelles obligatoires au financement desquelles le tarificateur ne peut se soustraire ?
Dans la décision du 17 juin 2024, les juges répondent par la négative. Dans un premier temps, ils considèrent en ce qu’il résulte de l’application des dispositions du CASF en matière de financement, la possibilité pour l’autorité de tarification de financer des mesures de revalorisation salariale. Pour autant, poursuivent les juges, les associations ne peuvent tirer de ces dispositions un droit au financement des charges au coût réel.
En conséquence, en cas de contestation, les juges doivent rechercher si l’association a effectivement bénéficié d’une majoration de sa dotation. Dans l’affirmative, seule une erreur manifeste d’appréciation dans la répartition faite peut conduire les juges à censurer la décision tarifaire. En d’autres termes, les juges ne peuvent prendre une telle décision sur le fondement d’une absence de compensation « au réel », l’association ne pouvant se prévaloir de l’existence d’un tel droit.
A noter : cette décision a été rendue dans le cadre de la tarification du forfait global de soins d’un EHPAD, déterminé au moyen d‘une équation tarifaire, au regard du cadrage des campagnes budgétaires 2021 et 2022. L’extension de cette solution à d’autres catégories d’établissements ou de services reste à confirmer. Il n’est donc pas certain que cette solution trouve à s’appliquer à d’éventuels contentieux liés à l’insuffisance de financement de la revalorisation des Oubliés du Ségur.
Quid des suites ? Seul un jugement pris dans le cadre d’un pourvoi en cassation pourrait contredire cette jurisprudence et fixer ainsi un principe différent, voire plus favorable aux associations. A défaut, il est sans nul doute que de futures décisions de la CNTSS viendront confirmer cette jurisprudence.
Aussi, nous pouvons nous questionner : En raison du transfert du contentieux de la tarification au profit des juridictions administratives de droit commun, cette jurisprudence sera-t-elle appliquée par les juges du contentieux administratif ?
Dans cette attente, nous ne pouvons que faire application de cette décision du 17 juin 2024, qui reste pour l’heure la décision de principe de la CNTSS en matière de financement des mesures Ségur.
Déborah Beneult, juriste droit social et Maxime Chometon, conseiller technique gestion/tarification